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Alexandra Fleisch-Viard

Une vie : Frederik de Klerk

Dernière mise à jour : 12 nov. 2021

Ce jeudi 11 novembre, Frederik de Klerk, ancien président de l’Afrique du Sud et emblème de la fin de l’Apartheid, s’est éteint à l’âge de 85 ans. L’occasion pour nous de nous replonger dans l’histoire de cet homme et du pays qu’il a présidé.



Héritage de l’Apartheid

Frederik Willem de Klerk naît en 1936 à Johannesburg, au sein d’une famille afrikaner – c’est-à-dire descendante des colons néerlandais - marquée par l’ultra-conservatisme et politiquement très influente. Son père, Jan de Klerk, occupe plusieurs postes de ministre entre 1954 et 1968. Ces racines guideront les choix de Frederik de Klerk tout au long de sa vie.


Alors que l’Afrique du Sud est depuis 1948 un régime d’apartheid, où la population est divisée en trois groupes raciaux : Blancs, Coloured et Noirs, il s’engage dans la vie politique en parallèle de ses études de droit. Membre du parti ségrégationniste de la droite Sud-Africaine - le Parti National - il se montre ultra-conservateur et partisan de la cause afrikaner.


C’est à cette période que des mouvements de contestation, tel que l’African National Congress (ANC), se forment contre le système en place. De ces mouvements émerge une figure de résistance : Nelson Mandela. Chef de l’ANC, ce dernier dirige la lutte contre l’Apartheid et est pour cette raison, emprisonné en 1962.


Parallèlement, F.W De Klerk gravit les échelons de la vie politique. Elu député en 1972, il occupe ensuite – tout comme son père – plusieurs postes ministériels. En tant que ministre de l’Education, il renforce la ségrégation dans les Universités. Et, alors que l’Apartheid atteint son paroxysme ; entre violences raciales, conflits armés et forte ségrégation ; De Klerk se forge une réputation d’homme dur. Il est tout sauf réformateur. Puis, en février 1989, il est désigné chef du Parti National avant d’être élu président de l’Afrique du Sud en septembre de la même année. Un renversement s’opère alors.



Changement de paradigme

Face aux révoltes de plus en plus violentes et fréquentes des populations noires, face aux sanctions et embargos économiques de nombreux pays (notamment l’exclusion des compétitions sportives) et face aux critiques virulentes de la communauté internationale, le président nouvellement élu doit répondre par d’inéluctables réformes. Il mise sur le libéralisme et le progrès et initie plusieurs décisions qui transforment le paysage politique sud-africain. Premièrement le 2 février 1990 il annonce devant le Parlement la légalisation des partis noirs et appelle à une Afrique du Sud non raciste. Nelson Mandela est libéré quelque jours plus tard, le 11 février, après 27 ans de détention dans d’ignobles conditions. Commencent alors les négociations pour mettre fin à l’apartheid, qui est officiellement aboli en juin 1991. Toutes les lois raciales sont abrogées, plus de 300 ans de domination blanche prennent fin.


Après des années de travail et de négociation sur la transition du pays, les deux hommes reçoivent conjointement en 1993 le prix Nobel de la Paix pour «leurs efforts visant à la disparition pacifique du régime de l’apartheid et pour l’établissement d’une nouvelle Afrique du Sud démocratique». Un an plus tard, les premières élections libres sont organisées, offrant une large victoire à l’ANC. De Klerk devient vice-président de Nelson Mandela. Mais cette cohabitation est mal vue par le Parti National, qui se retire du gouvernement. Le dernier président de l’Apartheid quitte lui complètement la vie politique en 1997.


Crédit Photo : AFP


Postérité

Pour le chercheur Thierry Vircoulon, Frederik de Klerk « n’est pas une icône comme Mandela mais il a joué un rôle historique fondamental ». Nelson Mandela a, quant à lui, toujours rappelé le « rôle incontesté » de son prédécesseur dans « l’évitement d’une explosion de violence aveugle en Afrique du Sud ». L’image de l’Afrikaner s’est par ailleurs beaucoup détériorée par la suite en Afrique du Sud : « encensé à l’étranger, mais oublié dans son propre pays », expliquait une chercheuse au Monde.


Si ses dernières années ont été marquées par des polémiques : il a plusieurs fois qualifié Nelson Mandela de « brutal et injuste », défendu certains agissements des Afrikaners ou encore nié que l’apartheid ait été un crime contre l’humanité, F.W De Klerk, qu’un cancer des poumons a emporté, s’est exprimé dans un ultime message :


« Je m’excuse sans réserve pour la douleur, la souffrance, l’indignité et les dommages que l’apartheid a causé aux noirs, aux [colored] et aux indiens d’Afrique du Sud. Permettez-moi dans ce dernier message de partager avec vous le fait que depuis le début des années 80, mon point de vue a complètement changé et du fond du cœur, j’ai compris que l’apartheid était une erreur. »


Rappelons que face à la Commission Vérité et Réconciliation, qui fut chargée d’enquêter sur les crimes de l’Apartheid, il se refusait de reconnaître la moindre responsabilité personnelle.


Mais, si controversée soit la figure de Frederik Willem De Klerk, nous avons hier perdu le lien direct avec l’histoire. A nous maintenant de ne jamais l’oublier.


Crédit Photo : Fondation F.W. de Klerk

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