Bonjour.
Je me présente, je suis une femme.
Je suis une femme avec une histoire.
Je suis une femme qui a appris à se méfier.
Je suis une femme qui apprend tous les jours à se défendre.
Je suis une battante.
Une battante contre ma propre société.
Contre mes semblables.
Je me bats contre l’idée qu’on puisse me faire du mal sans être réprimandé.
Je me bats pour rester la seule et unique propriétaire de mon corps.
La seule qui choisit.
La seule qui dit « Oui ».
Je me bats pour la justice.
Ce combat ne devrait pas être. Pourtant il est mené par les mêmes personnes que moi depuis longtemps, et encore aujourd’hui, il persiste. Tout a commencé au début, au tout début, quand je n’osais même pas penser que ce n’était pas normal, que je n’avais pas à supporter ça. On me disait que c’était la loi du plus fort et que je devais accepter d’être faible. Que je devais servir et obéir. Il a fallu attendre 1857 pour connaitre la première réprimande contre « l’attentat à la pudeur ». Près de 180 décennies et demie d’harcèlement, d’agressions, de viols, de peur, acceptés. En 1857, mon agresseur, qu’il ait usé de force physique, morale, de surprise ou de contrainte, est passible de travaux forcés ou de perpétuité. En 1857, le viol subi par un homme ou le viol d’un mari sur sa femme, et inversement, n’est pas reconnu comme tel. Un siècle plus tard, en 1980, le crime que constitue le viol est pour la première fois nommé. Il est alors défini comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte ou surprise ». Et paradoxalement en 1980, mon agresseur puni de perpétuité sous Napoléon, n’est plus passible que de dix ans de prison. C’est en 1994 que ce dernier est passible de 15 ans de prison. En 2006, une modification du crime de viol dans le code pénal est complétée par : « la présomption de consentement des époux vaut jusqu’à preuve du contraire ». Sous l’effroi des associations et du peuple, cette modification est annulée en 2009, soit il y a 11 ans. La justice ne faisant pas son travail, ma voix s’est levée. En octobre 2017, le producteur américain Harvey Weinstein est accusé de harcèlement sexuel sur plusieurs femmes. Il n’est reconnu coupable que le 24 février 2020, et est passible de 29 ans de prison. C’est le début de la fin, la fin de l’illusion. Les victimes se lèvent et parlent, elles n’ont plus peur. Elles se défendent et se soutiennent. La peur est finie. De nombreux mouvements comme le #MeToo ou #BalancetonPorc, des associations se créent et le peuple se réveillent. C’est une nouvelle ère pour la justice, la fin de la culture du viol et le début de sa mise en lumière.
Jeanne Dufour
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