Obtenir une image de l’opinion publique, prévoir le dénouement d’une élection, meubler le fil info d’une chaîne télé… Nombreux sont les rôles des sondages politiques, eux qui, à l’heure actuelle, sont vingt fois plus nombreux qu’en 1974. Leur nombre croissant n’a-t-il pas pour effet la baisse de leur fiabilité ?

Un outil politique
Le sondage est un outil quantitatif régulièrement utilisé afin de collecter des données à des fins sociologiques. Mais leur recours est beaucoup plus important avant une élection, présidentielle ou autre. C’est un outil politique et acteur majeur qui sert à la fois aux citoyens et aux candidats sujets à cette opinion.
Le sondage est censé représenter l’ensemble de la population grâce à la sélection d’un panel représentatif de tous. Il s’agit d’un outil relatif au système démocratique de notre pays, puisqu’il représente symboliquement la pluralité des choix électoraux ainsi que les libertés liées à ce choix. Pour le citoyen, il s’agit d’un moyen d’exprimer ses préférences : c’est un mode d’expression à ne pas négliger. De plus, il a été démontré que les sondages ne participent pas seulement à l’expression des préférences, mais aussi à la construction de celles-ci. En effet, l’opinion des autres influence la nôtre et moins une personne est impliquée et informée en politique, plus cet effet est important.
L’évolution de ces enquêtes est suivie de près par les candidats eux-mêmes. Conscients de leurs impacts sur leurs campagnes, on observe que leurs avis sur la chose varient selon si le dernier sondage en vue leur est favorable ou non. C’est donc un appui majeur pour celui qui en sort favori et un fardeau pour ceux dont « la campagne ne décolle pas », comme aiment répéter les journalistes.
Un outil médiatique (qui tourne à l'obsession)
Le sondage est consommé par les médias matin, midi et soir. Le recours exagéré à ces enquêtes ne sert pas à les rendre plus suivies par les électeurs, ni perçues comme fiables. On observe ici deux phénomènes : - Le nombre de sondages serait vu comme trop élevé mais servirait à appuyer une opinion (va renforcer la préférence pour le candidat qui reste en tête dans dix sondages à la suite par exemple) - Le nombre de sondages serait vu comme trop élevé et cette obsession des chiffres renforcerait le désintéressement face à la politique et décrédibiliserait le débat.
Dans tous les cas, la surconsommation de sondages n’allège pas le climat médiatique et politique. A trop vouloir prédire l’avenir, les médias oublient la fonction fondamentale de ces enquêtes, à savoir obtenir une photographie des intentions de vote à un instant T. Celle-ci aura très probablement évolué au cours des semaines, au gré des rebondissements politiques ou encore de l’évolution du contexte socio-économique du pays.

A consommer avec modération et prudence
Toute publication d’un sondage est soumise à un encadrement spécifique. Le contrôle du respect de la loi et de la méthode employée est conduit par une Commission spécialisée, composée de membres issus des plus hautes instances judiciaires (n’a aucun pouvoir sur ces résultats).
En vue de l’accroissement de leurs nombres, la Loi oblige depuis mars 2021 la mention d’une marge d’erreur pour tout sondage portant sur l’élection présidentielle. Il s’agit de mesurer, à l’aide d’outils statistiques, l’incertitude à attacher à chaque résultat. La plupart du temps, l’institut en charge de l’enquête donne à 95% le niveau de fiabilité du résultat. Cependant il faut préciser que ces 95% correspondent à la probabilité que le résultat soit tel, avec une marge de 3% supplémentaire (le vrai résultat se situe à 3% autour de celui du sondage). Pour une élection comme la présidentielle où le résultat final se joue souvent à quelques pourcentages près, vouloir prédire le résultat à l’avance serait ignorer ces détails mathématiques.

Tout ceci invite à regarder les sondages avec prudence et modération, sans objecter le fait qu’ils procurent une idée globale de l’opinion publique, ainsi qu’une certaine dynamique à une campagne présidentielle dont le dénouement va certainement se jouer à un fil.
Comentarios