Révolte-Toi est souvent comparé à la version politiste du football. A l’échelle nationale, peu de choses peuvent rivaliser avec des amphithéâtres pleins d’étudiants envenimés, qui chantent leurs hymnes et sifflent l’opposition. Une façon pour la jeune bourgeoisie intellectuelle de se distraire entre deux matchs de tennis et de rugby, sans se fondre dans la foule populaire de la ligue 1.
Il y a un classico, ENS contre Sciences Po Paris, une Fédération internationale, la FFD, un championnat national, des unions régionales et un public fidèle et aguerri. La sélection d’une école est sensée la représenter, être son ambassadrice et sa fierté. C’est une façon comme aucun, de rayonner dans le milieu des sciences politiques, de charrier les étudiants des écoles rivales.
Il en est de même à Lille. C’est avec grande appréhension que tous attendaient le derby de rentré, le choc SPL-ESPOL, en la présence d’émissaires de la SKEMA, de l’Université de Lille (anciennement Lille II) et autres affiliations. Etudiants des deux écoles ont appris à se respecter, tout en entretenant une saine rivalité de promotion en promotion.
Depuis sa création il y a quatre ans, Révolte-Toi a connu de grands succès. Une magnifique épopée en coupe de France 2016, un scalp de Sciences Po Reims en 2016 et une invincibilité logique contre Lille II. Mais une statistique parle plus fort que toutes les autres : ESPOL n’a jamais battu Sciences Po Lille. Sans parler du désastre de la Coupe de France. La série noire espolienne continue toujours, depuis 3 ans.
Espol ne gagne pas. Espol ne gagne plus.
Rien ne va plus à RVT ESPOL, et personne ne s’en alarme. Les défaites se succèdent, mais rien ne change sur scène comme dans les gradins. Où sont les révoltés ? Ils ne sont ni dans l’administration, ni dans le public et encore moins derrière le pupitre. Lundi soir, ESPOL a été de nouveau soumise.
Les seules consolations sont des titres anecdotiques de meilleurs orateurs – qui, s’ils sont mérités, sont souvent donnés comme consolation à l’équipe perdante. Il ne faut plus s’abrutir derrière des excuses comme quoi « nous méritions de gagner », « c’était leur premier débat » ou « même leur président pensait qu’Espol avait été meilleur » ou encore « le jury était celui d’anciens sciences pistes ».
Les excusent tombent à bas face à la réalité. Si RVT Espol continue à perdre, c’est que la recette ne marche plus – que ce soit dans le choix d’orateurs, leur préparation ou leur prestation. Si trois jurys différents arrivent tous à la même conclusion, il faut apprendre de nos erreurs. Le temps où l’on pouvait crier plus fort que l’opposition et où le public déterminait qui gagnait à l’avance est révolu. Aujourd’hui la révolte est plus sobre, plus réfléchie, plus habile qu’Espol n’a jamais été.
En football, un sélectionneur qui ne change pas son équipe après trois défaites consécutives est viré.
De façon réaliste, il est extrêmement facile pour Sciences Po de se moquer d’ESPOL. Car pour l’écrasante majorité des espoliens, ils ne sont à Espol qu’en tant que rejetons du concours. Ne leur donnons pas une nouvelle raison pour nous rabaisser publiquement.
Les orateurs doivent se souvenir qu’ils nous représentent, qu’ils le veuillent ou non. C’est en notre nom à tous, étudiants, qu’ils se tiennent sur le podium, derrière un pupitre, en face de la foule. Ne les laissons pas être éblouis par les lumières des projecteurs et les ovations. La défaite doit être immédiatement suivie d’une intense remise en question.
Avant de sonner la révolte dans nos amphis, sonnons la dans notre équipe, dans nos sessions et dans nos débats internes. Faisons-nous révolte contre nous-mêmes. « Ce n’est pas la révolte en elle-même qui est noble, mais ce qu’elle exige » écrit Albert Camus. Car temps que les choses demeurent telles quelles, Espol a beau avoir des individualités hors pairs, Espol ne battra jamais Sciences Po.
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