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La légitimité du président face à l'abstentionnisme

Capucine Gidoin

La démocratie représentative, régime instauré en France depuis 1871, est un moyen pour les français d’exprimer leurs volontés et de donner leurs opinions, grâce à leurs pouvoirs de souveraineté. Un droit qui leur est conféré et qui leur donne ainsi une liberté totale d’opinion. Pourquoi alors y a-t-il autant d’abstention aux élections présidentielles, comme aux élections législatives ? Passivité, méfiance ou faible capital culturel ? De nombreuses raisons pourraient expliquer ce phénomène. Lors des élections présidentielles de 2017, on a enregistré un taux d’abstention de 25,3%, soit 74,7% des inscrits seulement qui se sont exprimés. N’est-ce pas mettre en danger la légitimité démocratique que de refuser d’aller voter ? Car il faut se rappeler que la base d’une démocratie républicaine est d’abord ses électeurs qui votent et qui donnent mandat à des représentants pour gouverner, agir et réaliser des actions qui contribuent au bien-être de la société. Ces représentants vont influer sur la vie individuelle des citoyens et sur la société, c’est pourquoi la démocratie permet aux citoyens de les choisir. Pourquoi donc a-t-on enregistré en 2017 autant d’abstentions ? Est-ce une menace pour la légitimité du président ? Est-il légitime d’être régit par un gouvernement qui a obtenu moins de 44% des inscrits ?


crédit photo : Ludovic Marin / AFP


Pourquoi l'abstentionnisme ?

Alexis de Tocqueville tente de trouver la raison pour laquelle l’abstentionnisme est si présent dans son œuvre De la Démocratie en Amérique publié en 1835 et en 1840 : selon lui, les pays ayant vécus une révolution violente ont plus tendances à se décharger de leurs responsabilités politiques. Cela expliquerait donc le record d’abstention de 58,4% lors des élections municipales de 2020, face à une crise sanitaire inattendue.

Mais en 2017, aucune révolution violente n’a pu justifier un taux de 25,3% d'abstentions. Il semblerait que cela relèverait plutôt en partie d’une baisse du sentiment d’appartenance collective et d’identification partisane. On observe en effet qu’il y a en France de moins en moins de partis avec des intérêts sociaux, comme les jeunesses catholiques ou le parti communiste par exemple au XXème siècle. Le vote est de plus en plus individualisé : on vote pour une personnalité et un programme, détaché de toute appartenance partisane. Ce fut le cas d’Emmanuel Macron en 2017, puisqu’il se déclara au-delà des clivages et créa un nouveau parti, s’ajoutant dans la multitude de partis déjà existants dans le champ politique français.



"Au premier tour on choisit, au deuxième on élimine"

Mais au-delà de cette baisse de sentiment d’appartenance partisane, on assiste également à un phénomène présent à chaque élection en France : le vote utile résumé par l’expression « au premier tout on choisit, au deuxième on élimine ».

Noman Cadoret ; un jeune étudiant en photographie ; s’est exprimé sur son droit de vote aux élections présidentielles en 2017 : « Je n’irai pas voter. Vue la configuration de ce second tour, je ne veux donner du poids ni à l’un ni à l’autre. Il n’est pas légitime d’avoir à choisir entre un ultralibéral et une ultraraciste. Donc je vais passer la journée en famille, ça sera très bien. » L’intervention de cet étudiant semble résumer en quelques lignes la situation à laquelle font face les français depuis plusieurs décennies : voir au second tour deux candidats opposés et qui ne conviennent pas pleinement à la plupart de leurs pensées. C’est la terreur des français que de devoir choisir entre deux candidats qu’ils n’apprécient pas et ce tous les 5 ans. Cela pourrait ainsi être une raison pour laquelle presque un tiers d’entre eux s’abstiennent d’aller au bureau de vote.

Cela questionne d'autant plus la légitimité du président actuel, puisque les 43,61% qu’il a obtenu étaient en majorité des votes prônant à éliminer Marine Le Pen du champ présidentiel. Plusieurs intellectuels et politiciens se sont questionnés sur cette légitimité, dont Edwy Plenel, le président et le co-fondateur du journal MediaPart. Il l’évoque d’ailleurs dans son œuvre Le Président de Trop, publiée en 2011, dans laquelle il condamne le présidentialisme, qui confisque la volonté de tous par le pouvoir d’un seul ; creusant la dépression citoyenne et accroissant la démobilisation électorale.



Le militantisme de l'abstentionnisme

Enfin, une raison toute autre à cet abstentionnisme débridé : le militantisme de l’abstentionnisme. Il y a en effet des jeunes engagés, ni Macronistes, ni Lepenistes (dans le cas des élections présidentielles de 2017), qui pratiquent un abstentionnisme militant et qui ne vont pas voter pour que le président ait le moins de légitimité possible. Un problème qui semblerait être traité à l’envers mais qui s'apparente à un véritable combat pour certains français. L’abstentionnisme ne leur apparaît donc plus comme un problème mais bien comme un moyen pour eux de parvenir à leurs fins.

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