Quelques jours après la Journée Internationale des droits des femmes, il semble nécessaire de refaire un point sur leur situation dans le monde du travail et de l’entreprise. Si de nombreuses discriminations dues au genre sont encore pointées du doigt, nous nous concentrerons néanmoins sur les enjeux économiques des politiques de mixité professionnelle et ‘d’égalité réelle’. De nombreux faits sur la présence des femmes dans le monde du travail peuvent être trouvés sur le site du gouvernement, de l’INSEE, du Ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes, ou sur d’autres sites plus spécifiques. Afin de mieux comprendre les chiffres et en percevoir l’évolution, nous devons dans un premier temps analyser quelques constats.
Tout d’abord, une distinction doit être faite entre le secteur public et le secteur privé, où beaucoup d’outils contraignants sont déjà employés dans un but de parité. Deux grandes thématiques découlent de ces contraintes juridiques : la question de l’inégalité salariale, et la question de la représentation. Parmi ces obligations légales, nous pouvons retrouver la loi Copé-Zimmermann imposant un quota de 40% de femmes dans les conseils d’administration des sociétés ayant plus de 250 salariés (ou plus de 50 millions de chiffre d’affaires). En lien (plus ou moins direct) avec cette obligation, les conseils d’administration des grandes entreprises du CAC40 comptent désormais 44,6% de femmes (2020), contre 10,7% en 2009. Des lois renforçant une politique de négociation sont aussi mises en place pour la mixité professionnelle (2014 -2015), ainsi que des comptes rendus annuels des avancées, dans le cadre de l’Index de l’égalité professionnelle (créé en 2018, et entrainant depuis le 1er mars des sanctions pour les entreprises de plus de 50 salariés n’atteignant pas la note de 75/100). Celui-ci se base sur un certain nombre de donnés (retour de congés maternité, écarts de rémunération injustifiées etc.) liées à la ‘liberté de choisir son avenir professionnel’. D’autres lois, comme celle du 24 décembre 2021 (‘loi Rixain’), continuent dans cette voie dans le but de favoriser la transparence (publications officielles des index d’égalités ou des processus de progression) et l’égalité professionnelle (e.g quotas dans les cadres-dirigeant(e)s à l’horizon 2027).
Par ailleurs, les écarts salariaux existants font beaucoup débat, et le traitement des chiffres peut se révéler très complexe. A première vue, les femmes salariées gagnent en moyenne 16,8% de moins que leurs homologues masculins en équivalent temps plein (EQTP, soit pour un même volume de travail dans le secteur privé, 2017). Plusieurs grandes lignes de questionnement dépendent de cette donnée : quelle est l’ampleur des inégalités de volume de travail ? quel lien l’écart salarial entretient avec la profession occupée ? quel est l’impact de l’avancement dans la carrière sur le salaire des femmes et la corrélation de celui-ci avec leur statut familial ?
Il semble difficile de décorréler ces différentes questions et d’y répondre à toutes. Par exemple, les femmes sont plus souvent à temps partiel que les hommes, ayant un impact sur l’écart de salaire. De la même manière, 2/3 des écarts de salaire sont liés à la profession occupée (selon l’INSEE), marqué par une distinction professionnelle claire dans les emplois les plus courants chez les femmes par rapport à ceux des hommes. Ainsi, 68% de l’écart de salaire en EQTP semble alors provenir du fait que les femmes n’occupent pas le même type d’emploi que les hommes. Qu’une telle répartition entre les postes tienne d’un choix de carrière ou d’une contrainte ne relève cependant pas d’une analyse économique. Aussi, l’écart revient alors à 5,3% pour un poste identique (secteur privé, 2017). Dans une perspective plus large, les femmes ont moins fréquemment accès aux emplois les mieux rémunérés (36% inférieur, pour les 10% des postes les mieux rémunérés). Si les composantes de ces inégalités ne peuvent pas être développées exhaustivement dans cet article, nous pouvons cependant revenir sur la question de la famille. En effet, les écarts de rémunération sont nettement plus importants entre mère et père qu’entre deux personnes sans enfant (7% inférieure sans enfants contre 21% pour 2 enfants ou 31% pour 3 ou plus, en EQTP). Cette différence de statut s’accroit aussi pour les postes les mieux rémunérés. Les réformes des congés parentaux auraient alors pour but de contribuer à la réduction de ce clivage. Cependant, cela demeure encore un enjeu sociétal lié à la sphère privée, et rattaché à la question des responsabilités parentales.
Ainsi, si les inégalités salariales ‘injustifiées’ et les écarts de salaire se réduisent (environ 0,4 point par an en moyenne) depuis 40 ans, de nombreuses démarches restent encore insuffisantes ou inefficaces. A titre d’exemple, et selon l’Index de l’égalité professionnelle, 11% des entreprises qui y sont soumises (soit 2354, dont 406 depuis 3 ou 4 ans) ont obtenu 0 à l’indicateur du « retour de congé », rentrant en infraction avec la loi de 2006 garantissant aux femmes une augmentation salariale équivalente à celle attribuée aux autres salariés à son retour de congé maternité.
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