Le 23 janvier, a eu lieu le cinquième Forum mondial de l’Holocauste à Jérusalem. C’est au mémorial de Yad Vashem qu’environ quarante chefs d’Etat et de gouvernement et une quarantaine des survivants de la Shoah se sont réunis. Ce grand rassemblement a eu lieu quelques jours avant le 75e anniversaire de la libération du camp de concentration d’Auschwitz. Il s’agissait d’un évènement important pour Israël qui joue un rôle fondamental dans la mémoire de la Shoah et qui n’avait jamais organisé une telle cérémonie. Ce forum, dont le premier avait eu lieu en 2005 à Cracovie, a pour but de commémorer la « Shoah », le génocide des Juifs commis par l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Emmanuel Macron, Vladimir Poutine, le prince Charles et le président de la République fédérale allemande Frank-Walter Steinmeier étaient présents à ce rassemblement. Les Etats-Unis ont envoyé Jared Kushner, un conseiller du président américain, mais ce dernier a annulé sa visite, acte désapprouvé immédiatement par la Maison Blanche. Organisé par un proche du président russe, le milliardaire juif russe Viatcheslav Moshé, le thème du forum était le suivant : « Se souvenir de l’Holocauste, combattre l’antisémite ». Le président Poutine y a d’ailleurs prononcé un discours dans lequel il souligne l’héroïsme du « peuple soviétique » et incite à organiser prochainement un sommet réunissant les cinq puissances nucléaires du Conseil de sécurité de l’ONU pour renforcer la paix dans le monde.
Toutefois, ce forum mondial de l’Holocauste a fait l’objet de controverses. D’une part, pour son aspect très politique et diplomatique étant donné le grand nombre de personnalités politiques présentes. D’autre part, le président polonais Andrzej Duda, convié à l’évènement, a annulé sa venue. Cette décision peut s’expliquer par la présence de son homologue russe, Vladimir Poutine, avec qui les relations se sont dégradées. En effet, le Président russe accuse la Pologne d’avoir été un pays complice d’Adolf Hitler et d’être en partie à l’origine de la Seconde Guerre mondiale. En outre, une tension est apparue entre la Pologne et Israël depuis le vote d’une loi par la majorité ultranationaliste à Varsovie en janvier 2018, qui prévoyait des amendes et trois ans de prison pour ceux qui rendraient responsable la Nation ou l’Etat polonais des crimes commis par le Troisième Reich allemand. Cette loi avait été perçue par la communauté internationale et particulièrement par Israël comme un déni du rôle joué par certains polonais dans le génocide des Juifs.
Quelques jours plus tard, le 27 janvier, a eu lieu la commémoration du 75e anniversaire de la libération du camp de concentration d’Auschwitz, qui s’est déroulé dans le camp lui-même. Construit à partir de 1940 dans le sud de la Pologne occupée, il est devenu le symbole de la Shoah. La cérémonie a réuni une soixantaine de chefs d’Etat ou gouvernement et plus de deux cent survivants. À la tombée de la nuit, une marche des survivants de l’Holocauste, lumignons à la main, a eu lieu le long du chemin de fer qui avait conduit à l’époque des Juifs aux chambres à gaz. Des lumières et des fleurs ont été déposées également près d’un monument commémoratif et du « mur de la mort », où des milliers de prisonniers ont été abattus par les nazis. Les survivants étaient vêtus de bonnets et d’écharpes à rayures bleues et blanches afin de rappeler les uniformes des prisonniers du camp. Les derniers survivants de la Shoah, témoins directs des atrocités, étaient au centre de l’attention.
Cette commémoration a par ailleurs eu lieu dans un contexte de montée de l’antisémitisme dans le monde, alors que des partis d’extrême droite en Europe prennent de l’ampleur et que des groupes de suprémacistes blancs aux Etats Unis se forment. Ronald Lauder, président du Congrès juif mondial a dénoncé dans son discours que : « Il est honteux que 75 ans plus tard, ils (les survivants d'Auschwitz N.D.A) voient leurs petits-enfants à nouveau confrontés à la même haine... cela ne doit jamais être toléré ». Le président polonais Andrzej Duda a invalidé lui, le négationnisme et le révisionnisme historique. Les présidents d’Israël, d’Allemagne et d’Ukraine, le Premier ministre français et des représentants des Etats-Unis et de la Russie étaient présents. Le président russe Poutine n’a pas été invité suite aux accusations de ce dernier envers la Pologne.
Ces deux cérémonies commémoratives ont eu pour objectif de rappeler les atrocités de la Seconde Guerre mondiale, que les générations présentes et futures ne doivent pas oublier. Les différentes attaques antisémites et les mouvements extrémistes qui se sont développés ces derniers mois montrent une tendance inverse. Enfin, les tensions entre la Russie et la Pologne révèlent une opposition politique et mémorielle entre les deux pays.
Morgane Roose
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